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« Simplifier la vie des Français » : oui, mais simplifions réellement !

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16 juin 2015

Bon Point

« Simplifier la vie des Français » : oui, mais simplifions réellement !


92 mesures de simplification, pour les particuliers et les entreprises

 

Deux ans après l’annonce du « choc de simplification », le gouvernement a présenté, le 1er juin, des mesures en faveur des particuliers et des entreprises.

Sur les 92 mesures dévoilées par le secrétaire d’Etat chargé de la Réforme de l’Etat et de la Simplification, Thierry Mandon, 40 concernent les démarches administratives des particuliers.

 

Des mesures au chapitre « Je prends soin de ma santé »

 

Sont visés, en tout premier lieu, les droits relatifs à l’accès aux droits pour accéder aux soins, sous le chapitre « Je prends soin de ma santé ».

Ce placement dans le plan des mesures de simplification n’est pas neutre. Il témoigne à la fois de l’urgence et de l’ampleur de la tâche qui consiste à fluidifier les droits permettant l’accès aux soins.

 

Cinq mesures sont ainsi annoncées :

  1.  Renouveler automatiquement le droit à l’aide pour une complémentaire santé pour les bénéficiaire du minimum vieillesse.

Les bénéficiaires du minimum vieillesse (ASPA) doivent, chaque année, renouveler leur demande pour bénéficier de l’Aide à l’acquisition d’une Complémentaire Santé (ACS), et cela même si leur situation n’a pas changé. A défaut, leurs droits à l’ACS seraient suspendus.

 

La mesure  de simplification prévoit le renouvellement annuel automatique des droits à l’ACS des personnes concernées d’ici juin 2016.

 

  1. Ne plus déclarer deux fois son arrêt maladie pour un demandeur d’emploi.

Un demandeur d’emploi en arrêt de travail en raison de son état de santé doit déclarer son arrêt à sa caisse d’assurance maladie (qui lui verse ses indemnités journalières) et à Pôle emploi qui suspend ses prestations de chômage.

 

La mesure de simplification prévoit une seule déclaration à Pôle emploi qui transmettra à la caisse d’assurance maladie pour le paiement des indemnités journalières, d’ici fin 2015.

 

  1. Automatiser la transmission des informations relatives à votre déménagement à votre nouvelle caisse d’affiliation de la mutuelle sociale agricole (MSA)

En cas de déménagement et de changement de caisse d’affiliation au régime agricole, les assurés doivent fournir les informations relatives à leurs situations à leur nouvelle mutuelle sociale agricole (MSA).

 

Avec la mesure de simplification, un certification de mutation sera dématérialisée et transmise automatiquement à la nouvelle caisse qui garantira le maintien de droits.

La dématérialisation des certificats de mutation sera ensuite étendue aux caisses d’allocations familiales, d’ici fin 2015.

 

  1. Faire son changement de situation familiale ou professionnelle sur le site msa.fr

Actuellement, il est nécessaire d’adresser un courrier ou de se déplacer pour effectuer un changement de situation familiale ou professionnelle auprès de la MSA.

 

La mesure de simplification permettra une déclaration en ligne, sur le site msa.fr, des changements de situation familiale ou professionnelle, sans avoir à remettre de pièces justificatives (nécessaires uniquement en cas de contrôle), d’ici juillet 2015.

 

  1. Demander une attestation en temps réel à la mutuelle sociale agricole (MSA)

Les attestions fournies par la MSA ne pouvaient actuellement l’être qu’à la condition de prendre contact avec la caisse (se déplacer ou téléphoner).

 

Depuis décembre 2014, les demandes en lignes sont possibles (attestations des droits, de médecin traitant, de relevé annuel de prestations santé, de paiement de pension d’invalidité, de paiement de prestations familiales et de logement, de relevé de situation individuelle retraite, etc…)

 

Résumons : sur cinq mesures annoncées en matière de simplification des droits relatifs à la santé, trois concernent exclusivement les assurés du régime agricole dont une est entrée en vigueur depuis plus de cinq mois.

 

C’est bien. Mais c’est faible.


- Quelle mesure pour faire face aux multiples cas d’errances administratives dont sont victimes des centaines d’assurés sociaux désaffiliés suite à un changement de situation alors même que notre droit garantit à quiconque, qui déclare auprès d'une caisse primaire d'assurance maladie ne pas bénéficier des prestations en nature des assurances maladie et maternité, une affiliation sans délai au régime général sur justification de son identité et de sa résidence stable et régulière ?

 

Le CISS faisait en effet apparaître dans son Observatoire sur les Droits des malades de 2012 que « 8,9% et 8,2% des sollicitations relevant de la thématique ‘Accès et prise en charge financière des soins’ concernaient des questions mettant respectivement en jeu les règles d’affiliation au régime d’assurance maladie ou à la CMU de base. Environ un quart de ces sollicitations se plaçait sur un terrain contentieux. »

 

- Quelles mesures pour lutter véritablement contre le non-recours aux droits à l’ACS qui oscille entre 60% et 72%[1] ?

 

- Quelles mesures pour améliorer l’accès à la Couverture Maladie Universelle Complémentaire  (CMU-C) quand on sait que le taux de non-recours se situe entre 28% et 40%[2] ?

La Cour des Comptes, dans  son dernier rapport, ne propose-t-elle pas le recueil exhaustif des demandes de CMU-C lors de l’instruction des demandes de RSA, par exemple ?

 

- Quelles mesures pour améliorer la performance des systèmes d’information du  régime général qui peinent tant à suivre la mobilité de leurs assurés d’un département à un autre ?


- Quelle mesure pour simplifier les droits de celles et ceux à qui des dépassements d’honoraires sont facturés indûment, comme c’est le cas pour les bénéficiaires de la CMU-C et de l’ACS ?

La loi Hôpital, patients, Santé et Territoire de juillet 2009 prévoit bien une procédure de sanction mais, 6 ans après, nous attendons encore les décrets d’application…

 

La simplification administrative est, dans notre pays, une exigence constante qui suppose, d’une part, le toilettage de nos textes, d’autre part, le respect des droits existants, et enfin l’amélioration des systèmes d’information et des processus de partage entre nos administrations.

 

Simplifier, c’est avant tout moderniser pour permettre à chacun d’exercer ses droits. En matière de santé, c’est parfois une question vitale, comme le souligne douloureusement Véronique Picard qui, suite au décès de son fils Mathias en 2014, a créé l’association 24 heures Vitales  afin notamment de recueillir les témoignages de celles et ceux qui ont été « perdus » dans les épaisseurs administratives de l’Assurance maladie et d’« aider toute personne sans assurance maladie, intervenir sur les cas graves et obtenir immédiatement une carte vitale, même provisoire ».

 

Les associations de défense des droits des usagers du système de santé attendaient bien plus du « choc de simplification » annoncé. Ces mesures, utiles, donnent hélas le sentiment que les efforts seront relâchés sur le reste, immense espace de droits non respectés et de procédures qui tardent à faire leurs révolutions numériques…

 

 




[1] Rapport d’activité 2014 du Fonds CMU.

[2] Rapport d’activité 2014 du Fonds CMU.