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La pollution de l’air, un fléau de santé publique

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23 juillet 2015

Mauvais Point

Un rapport sénatorial estime le coût sanitaire de la pollution atmosphérique entre 68 et 97 milliards d’euros par an (1)

 

Une commission d’enquête constituée en 2005 sur le coût économique et financier de la pollution de l'air

 

Créée le 11 février 2015 et composée de sénateurs représentant l'ensemble des groupes politiques du Sénat, la commission d’enquête sur le coût économique et financier de la pollution de l'air a souhaité dresser un constat objectif sur la question de l’impact économique et financier de la pollution de l’air et trouver des solutions acceptables par tous et porteuses d’un développement économique durable.

 

Les travaux de la commission d’enquête ont débuté le 19 mars 2015. Les chercheurs, les ONG, les autorités publiques mais aussi les entreprises des secteurs concernés par la pollution de l'air ont été auditionnés.

 

Le 15 juillet dernier, la commission d’enquête a rendu son rapport, au summum de la pollution atmosphérique

 

Les pics de pollution sont si récurrents que l’on s’y habituerait presque. La qualité de l’air, rangé au rayon météo/éphéméride/indice uv, fait maintenant partie du quotidien des lecteurs  et des téléspectateurs de journaux qui relaient notamment les infos d’Airparif, Air PACA ou encore de l’Observatoire Air Rhône-Alpes.

 

Aussi installée qu’elle soit dans nos vies,  la pollution atmosphérique n’a rien d’anodin : elle nous rend malades…

 

Les pics de pollution entraînent un afflux de consultations aux urgences, c'est la pollution « de fond », c'est-à-dire la pollution constante, qui provoque les effets les plus durablement néfastes pour la santé. Les trois types de maladies causées par la pollution de l'air les plus communes sont les maladies respiratoires, au premier rang desquelles la bronchopneumopathie obstructive (BPCO), les pathologies cardiaques, dont les infarctus, et les cancers du poumon. Par ailleurs, le rôle de la pollution de l'air dans de nombreuses autres pathologies fait l'objet d'études et permet d'affirmer qu'il existe un lien, notamment, entre la pollution et certains problèmes de développement du fœtus, et des pathologies certes multifactorielles mais de plus en plus prévalentes comme la maladie d'Alzheimer et l'obésité. D’autant que, comme cela a été démontré dans de nombreux cas, ce n’est pas toujours la dose qui créé la maladie mais la durée de l’exposition a un risque.

 

 

… et nous coûte cher et même très cher…

 

Après avoir établi ces effets de la pollution de l'air, la commission d'enquête a tenté d'en mesurer les coûts en s'adressant aux administrations en charge de ces dossiers, aux économistes experts de ces questions et aux acteurs eux-mêmes.

 

Dans le détail, le coût sanitaire total de la pollution atmosphérique serait compris  « entre 68 et 97 milliards d'euros »  par an, retient le rapport (données du programme "Air pur pour l'Europe" de la Commission européenne), tandis que le coût non sanitaire est lui estimé à 4,3 milliards d'euros. A elle seule, la pollution de l'air intérieur représente un coût de 19 milliards d'euros par an.

L'impact sur le système de santé français est lui estimé « a minima » à 3 milliards d'euros, relève le rapport qui inclut les dépenses pour traiter l'asthme dû à la pollution, certains cancers, ou encore les frais d'hospitalisations. Mais le coût global « est largement sous-estimé », indique Leïla Aïchi, auteure du rapport, pour qui la France « est en retard » et « manque de recherches sur cette question ». Les effets sanitaires de certains polluants sont ainsi mal connus, notamment "l’effet cocktail" de la présence de plusieurs polluants.


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61 mesures pour agir à différents étages de la chaîne de responsabilité

 

La commission déplore la faiblesse de la mobilisation de l'Etat face à cet enjeu pourtant considérable pour la santé de la population mais également pour les comptes sociaux.

 

La commission énumère 61 mesures plaidant pour « une véritable fiscalité écologique » et pour « compléter les normes existantes » mal définies ou ne couvrant pas tout le champ des polluants connus.

 

Classées en 3 parties, ces propositions plaident pour un meilleur équilibre entre normes et fiscalité, l’innovation et la nécessité de l’accompagnement.

 

Quelques exemples :

 

- Intégrer la qualité de l’air intérieur et extérieur dans les processus de formation initiale des professionnels du bâtiment.

- Donner les moyens à l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses) d’effectuer la surveillance des produits présentés comme dépolluants de l’air.

- Evaluer le coût financier de l’absentéisme lié à la pollution de l’air et pics de pollution (pathologie des salariés et de leurs enfants, difficultés liées au transport.

- Enjoindre à l’AP-HP d’intégrer la problématique de la pollution de l’air en termes de santé publique.

- Etudier spécifiquement les causes de mortalité des agriculteurs du fait de certains types de cancers.

- Mettre en place des programmes de prévention des pathologies liées à la pollution de l’air portées par les régimes obligatoires et complémentaire d’Assurance maladie et d’AT-MP (branche Accidents du travail / maladies professionnelles).

- Intégrer l’impact sur la qualité de l’air dans les dossiers d’Autorisation de Mise sur le Marché des produits phytosanitaires.

 

 

*             *             *

 

La pollution de l’air, extérieur ET intérieur, ruine notre santé et nos ressources financières.

Selon une étude publiée fin mars dans la revue en ligne Jama Psychiatry (2), les enfants ayant été fortement exposés aux hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP) à l'état de fœtus auraient des impacts visibles sur le cerveau, qui pourraient se traduire par des troubles du comportement et une altération des capacités cognitives.

 

La quantité d'HAP dans l'air est donc fonction de la pollution et les citadins y sont plus confrontés.

 

Plusieurs lanceurs d’alerte dénoncent par ailleurs les effets de la pollution de l'air intérieur, dans les établissements de santé notamment.

 

Bien que nous soyons sensibilisés, depuis des années, sur l'importance du choix des matériaux intérieurs  (sols, revêtements, mobiliers), les meubles en bois aggloméré et autres substances à fortes émanations toxiques envahissent notre environnement au travail et à la maison, comme  les chambres de nos  enfants  et nos cuisines. L’information des consommateurs et l’action des instances chargées de la sécurité au travail sur les risques connus et encourus doivent être renforcées.

 

Le rapport de la commission d’enquête donne l’alerte. Si les problèmes de santé que cause la pollution de l’air ne sont pas assez graves pour inciter l’Etat à agir, peut-être sera-t-il sensible à l’évaluation de son poids sur les comptes publics ou les actions en responsabilité qui ne manqueront pas d’intervenir à terme !

Les mesures ne peuvent plus attendre. L’impact de la pollution doit être reconnu et surtout constituer une priorité de l’action gouvernementale dans les prochains mois.

 

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(1) Rapport fait au nom de la commission d'enquête sur le coût économique et financier de la pollution de l'air. Président : M. Jean-François HUSSON, Rapporteure : Mme Leila AÏCHI.

 

(2) Menée par Frederica Perera, directeur du centre pour la santé environnementale des enfants à l'université de Colombia aux États-Unis, l'étude a été réalisée sur 720 femmes enceintes des minorités urbaines de New York, se définissant elles-mêmes comme «Africaines-Américaines» ou Latino-Américaines». Non-fumeuses pour ne pas fausser les résultats, les futures mères en fin de grossesse ont enregistré pendant 48 h leur taux d'exposition aux polluants à l'aide d'un appareil de surveillance de l'air.

Le suivi de l'expérience s'est ensuite effectué sur 40 enfants issus de ces grossesses, nés entre 1997 et 2006. Choisis aléatoirement, 20 d'entre eux avaient été exposées à des doses faibles d'HAP pendant leur développement embryonnaire, les 20 autres à des doses élevées. À l'âge de 5 ans, leur propre taux d'exposition aux HAP a été mesuré par analyse d'urines, et entre 7 et 9 ans ils ont tous passé un IRM (imagerie par résonance magnétique) du cerveau, des tests comportementaux et de QI.