On ne décourage pas l’altruisme des donneurs vivants !
27 février 2015
On ne décourage pas l’altruisme des donneurs vivants !
L’Agence de la Biomédecine vient de publier un Guide de prise en charge financière des donneurs vivants d’éléments du corps humain…
… document fort utile lorsque l’Agence de la Biomédecine (ABM) compte en 2013 [1] :
- 19 000 personnes malades en attente de greffe ;
- 5 123 greffes d’organes, dont 414 à partir de donneurs vivants ;
- une augmentation du nombre de greffes à partir de donneurs vivants. On comptait 401 greffes de reins en 2013 contre 223 en 2009. Seules 13 greffes de foie (on peut prélever une partie du foie chez un sujet vivant) ont ainsi été réalisées en 2013, il y en avait 12 en 2009 ;
- 252 patients sont morts alors qu’ils étaient en attente d’une greffe de rein et étaient donc dialysés.
Tableau comparant le nombre de malades en attente de greffes ces 20 dernières années (en bleu) et le nombre de greffes réalisées (en rouge) [2] :
Pourquoi faut-il encourager le don du vivant ?
Le don du vivant apporte des solutions médicales dans les domaines de la greffe d’organes, de la greffe de cellules souches hématopoïétiques et de la procréation médicalement assistée. Ces thérapeutiques sont possibles grâce à la démarche altruiste de donneurs vivants qui ne reçoivent aucune contrepartie. De leur côté, les établissements de santé en charge du prélèvement des donneurs ont pour obligation de garantir la neutralité financière de leur don, de sorte que l’ensemble de la démarche de don ainsi que le suivi médical qui en découle n’occasionnent aucune dépense à leur charge.
La neutralité financière du don est encadrée par différents textes législatifs et réglementaires. La multiplicité des textes et des acteurs rend aujourd’hui l’application de ce principe complexe.
L’ABM constate, en effet, que les délais de remboursement des frais avancés par les donneurs sont longs et qu’un nombre encore trop important d’entre eux subit des pertes financières.
Un guide pour rappeler les principes juridiques sous-jacents à la neutralité financière, les démarches à suivre pour permettre la prise en charge intégrale des soins et le remboursement des frais du donneur et les recettes allouées aux établissements de santé en charge du prélèvement
Afin de rendre plus efficace la prise en charge financière des donneurs, l’ABM a élaboré un guide à l’attention des équipes chargées de mettre en œuvre le don du vivant et des équipes de direction des établissements de santé. Il porte sur les quatre types de don du vivant : les organes, les cellules souches hématopoïétiques, les gamètes (ovocytes et spermatozoïdes) et les embryons.
Comment se traduit le principe de neutralité financière du don ?
Le principe de la gratuité du don est posé dans le code civil et repris dans le code de la sécurité sociale et le code de la santé publique. Il a pour corollaire la neutralité financière qui garantit aux donneurs vivants et aux personnes qui les accompagnent le remboursement intégral des frais qu’ils ont engagés au titre du don ainsi que la prise en charge des dépenses de soins par les établissements de santé en charge du prélèvement.
Ce principe se décline, par exemple, par l’accès sans frais supplémentaires aux contrats d’assurance. Prenant en compte l’une des propositions du CISS, la loi de bioéthique de 2011 [3] a étendu le principe de neutralité financière du don du vivant au domaine de l’assurance. Ainsi « toute discrimination directe ou indirecte fondée sur la prise en compte d’un don d’organes comme facteur de refus de contrat d’assurance ou dans le calcul des primes et des prestations offertes au donneur ayant pour effet des différences en matière de primes et de prestations est interdite » [4].
Autre exemple, la réglementation prévoit que les « frais de suivi et de soins assurés au donneur en raison du prélèvement dont il a fait l'objet » sont à la charge de l’établissement de santé qui assure le prélèvement. Ils doivent donc être remboursés au donneur aussi longtemps que ce suivi s’avère nécessaire d’un point de vue médical [5].
De même, le remboursement des frais d’hébergement et de transport est dû dans le cadre des déplacements afférents aux examens et aux soins qui suivent le prélèvement ou la collecte [6].
Un guide utile à toutes les personnes directement concernées, en tant que donneur ou receveur
Le don du vivant est un acte fort et complexe. Si notre législation en la matière tente d’embrasser toutes ses conséquences, il est encore parfois difficile pour les personnes concernées d’exercer les droits qui leur sont reconnus.
Ce guide pédagogique répond utilement aux nombreuses questions extra-médicales que se posent donneurs et receveurs.
Pour une plus grande information des citoyens sur le don du vivant
Le don du vivant concerne environ 8% du total des greffes réalisées en France en 2013.
Depuis la révision de la loi en 2011, le cercle des donneurs est officiellement élargi à toute personne en bonne santé témoignant d’un « lien affectif étroit et stable depuis au moins deux ans avec le receveur » ; ce qui rend concrètement possible le don à un ami. Soit les proches manifestent leur souhait de donner un de leurs organes spontanément, soit les équipes médicales en parlent aux proches et initient la démarche.
Quoi qu’il en soit, il y a le passage devant un « comité d’experts donneur vivant » qui poursuit deux objectifs :
- si le donneur est le père ou la mère, s’assurer qu’ils sont bien informés et que leur consentement est libre et éclairé.
- dans les autres cas concernant les membres de la famille ou d’autres proches, il y a une autorisation après le passage devant le Tribunal d’Instance du lieu d’habitation de la personne.
Pour plus d’information :
> Télécharger le Guide de prise en charge financière des donneurs vivants d’éléments du corps humain sur la page http://www.agence-biomedecine.fr/Guide-de-prise-en-charge
> Consulter les sites www.greffeplus.fr et www.agence-biomedecine.fr
> A lire, le livre paru récemment, en librairies : D’autres reins que les miens. Patients et médecins racontent l'aventure de la dialyse et de la greffe, par Yvanie Caillé & Dr Frank Martinez, éd. du Cherche Midi, collection "Documents".
[1] Chiffres tirés du rapport 2013 de l’Agence de la Biomédecine.
[2] www.greffeplus.fr
[3] Loi n°2011-814 du 7 juillet 2011 relative à la bioéthique.
[4] Code des assurances, article L. 111-8.
[5] Décret n°2000-409 du 11 mai 2000 relatif au remboursement des frais engagés à l'occasion du prélèvement d'éléments ou de la collecte de produits du corps humain à des fins thérapeutiques et complétant le code de la santé publique, articles R 665-70-1 à 5 (modifié par décret le 24 février 2009) et Circulaire DSS/DH/DGS n° 2000-357 du 30 juin 2000 relative à la prise en charge des frais afférents au prélèvement ou au recueil d'organes, de tissus ou de cellules - y compris les gamètes - issus du corps humain à des fins thérapeutiques.
[6] Article R. 1211-5 et R. 1211-6 (modifiés par décret le 24 février 2009) du code de la santé publique.
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