Vers la fin de la République sanitaire…
07 juin 2016
Du congrès des maires de France à la publication des derniers chiffres du CNOM (Conseil national de l'Ordre des médecins) le 2 juin dernier pour son atlas annuel, en passant par les négociations conventionnelles, la démographie médicale de ville est de nouveau au cœur des débats. Elle va aussi peser sur les groupements hospitaliers de territoire en cours de constitution et qui doivent notamment tenir compte de l’organisation globale des soins sur le terrain.
Liberté, Egalité & Déserts !
Les départs à la retraite des médecins exerçant en ville progressent d’année en année, avec presque un doublement du nombre de médecins retraités (+87,7%) entre 2007 et 2016, et surtout il est de plus en plus difficile de leur trouver des remplaçants. Les médecins généralistes sont de moins en moins nombreux à exercer et cette chute devrait se poursuivre jusqu’en 2025. Elle pourrait se traduire par la perte d’un médecin généraliste sur quatre sur la période 2007-2025, souligne le CNOM.
Résultat : selon les Atlas régionaux de la démographie médicale publiés le 26 novembre 2015 par le CNOM, la France métropolitaine comptait déjà 192 déserts médicaux dans lesquels vivent près de 2,5 millions de personnes. Constat qui revient comme un marronnier chaque année dans l’expression de ceux qui sont en responsabilité. Tout comme reviennent, à coups de tables-rondes policées, des échanges sur l’intérêt de l’exercice pluridisciplinaire ou regroupé, ou encore la régionalisation de la formation initiale, parmi les outils potentiels pour faire barrage à cette désertification.
Constats et alertes infructueuses… Faut-il attendre les actions en justice des déboutés du droit aux soins pour agir véritablement ?
Fraternité & Dépassements !
Les déserts médicaux ne sont pas sans rapport avec les dépassements d’honoraires : le prix des soins variant de manière évidente en fonction des territoires. La superposition des cartes en atteste, c’est souvent là où les médecins sont les plus nombreux que les dépassements d’honoraires sont les plus élevés. Et ces mêmes dépassements s’imposent aujourd’hui aux patients avec une rare violence puisque les contrats de complémentaire santé plafonnent leur prise en charge lorsqu’ils sont facturés par des médecins non signataires du contrat de d’accès aux soins. Vous ne savez pas ce que c’est ? Dommage : c’est vous qui allez payer le reste à charge hors plafond de remboursement, directement de votre poche !
Des solutions possibles ... avec courage
Qu’il n’y ait pas de solutions simples ne veut pas dire qu’il n’y en a pas. Recentrer et renforcer les aides incitatives dans les zones sous-denses en est une, même si on peine à y croire tant ces solutions, vivement critiquées pour leurs effets d’aubaine, ont déjà été utilisées. Formons le vœu que les nouvelles aides soient plus pertinentes en visant les primo-installés plutôt que les déjà installés. Mais, nous restons là dans l’art de la retouche tant que les mesures d’incitation ne seront pas accompagnées de dispositions déterminées en matière de régulation de l’installation de l’ensemble des professionnels de santé dont les médecins.
Ainsi le CISS persiste à demander que les soins de ville soient organisés sur le plan géographique et tarifaire pour permettre une meilleure coopération des intervenants autant qu'une meilleure coordination des parcours, avec le même élan qui pousse aujourd’hui les pouvoirs publics à agir sur l’offre hospitalière. Car ces deux formes d’exercice sont complémentaires, l’une ne devant ni défavoriser ni déséquilibrer l’autre à son profit ou à son détriment. Les outils existent : ils sont dans des lois déjà adoptées.
A ne rien faire, nous marchons inexorablement vers la fin de la République sanitaire : pour compenser la désertification on déploiera alors dans les déserts médicaux des dispensaires hospitaliers (avec les excédents d’effectifs des restructurations hospitalières) et de la télémédecine (pour accéder à l’expertise réfugiée dans les grandes villes). L’autre France, celle qui va bien, aura des médecins + des hôpitaux + de la télémédecine. Autant dire la gradation des soins pour les riches, la dégradation des soins pour les pauvres !
Contact presse :
Marc Paris
Responsable communication
Tél. : 01 40 56 94 42 / 06 18 13 66 95
A télécharger :
Vers la fin de la République sanitaire…, communiqué de presse du CISS du 07.06.2016